Le mardi 27 janvier 2009, j'ai envoyé un mail à une partie de mes nombreux abonné(e)s intéressé(e)s directement ou indirectement par la problématique
Trans.
A partir de cette
"LETTRE OUVERTE à Monsieur Alain Piriou" (
lire ci-dessous), ex. responsable
au sein de
l'Inter-LGBT,
collectif
d'associations lesbiennes, gaies, bi et trans, en réponse à sa demande de désabonnement à ma newsletter (la
"webdromadaire" est envoyée irrégulièrement à partir de ma boîte mail 2 à 5 fois par mois, selon l'actualité et l'intérêt - lire plus bas ma NOTE IMPORTANTE), j'en profitais pour évoquer
brièvement le soutien "mitigé" que nous prodigue la "communauté homosexuelle" quand je ne parle pas de la transphobie que certains homosexuels dévoilent à travers leurs
paroles, voire pire leurs actes.
Lire à la suite de celle-ci la réponse d'Alain Piriou reçue dés ce matin mardi 27 janvier 2009.
Vos commentaires sont les bienvenus.
Caphi
LETTRE OUVERTE à Monsieur Alain
Piriou
Monsieur Alain Piriou,
Dans un courriel adressé ce jour, vous me demandez : "Je n'ai en effet pas sollicité vos messages, et ne souhaite donc plus les recevoir. Bien
à vous, et bon courage dans vos combat,
Alain Piriou alain@alain-piriou.net"
Sur les plus de 400 abonné(e)s à la newsletter de
ma
Webdromadaire - dont beaucoup de décideurs
culturels, économiques et médiatiques - j'ai rarement, pour ne pas dire aucun depuis 6 mois ! - des personnes qui demandent à se désabonner !
Cela d'ailleurs m'encourage à poursuivre mon travail inlassablement, même si je le fais toujours gracieusement malgré mes maigres moyens et ma précarité en partie à cause de mon statut de
"transsexuelle".
Je m'étonne quand une demande de désabonnement total (sans explication) vient de votre part sachant les
responsabilités que vous occup(i)ez au sein de l'Inter-LGBT, collectif d'associations lesbiennes, gaies,
bi et trans.
Monsieur Piriou, je porte aussi comme
votre blog l'annonce "
un regard
critique et engagé sur l’actualité sociétale".
Vous y déclarez aussi : "Je m'installe actuellement comme consultant" dans les domaines de la "communication sociétale, lobbying éthique,
non-discrimination et promotion de la diversité dans les entreprises et les collectivités.".
Mes combats et mes réflexions ne vous sembleraient-ils pas à la hauteur des vôtres et mes infos ne seraient-elles pas dignes d'être
lues de vous afin de participer - et de partager avec celles et ceux qui sont engagé(es) - au débat et au combat nécessaire pour la reconnaissance de TOUTES les différences
?
D'autant plus, qu'en France, la majorité des transsexuel(le)s sont aujourd'hui bien plus ostracisé(e)s, discriminé(e)s
que le sont la plupart des d'homosexuel(le)s, plutôt généralement bien intégré(e)s dans la société.
Et pourtant, je remarque à chaque fois que ces derniers manquent souvent à l'appel de nos R.V. pour soutenir nos combats telle la marche annuelle
EXISTRANS (en octobre) où la
"communauté homosexuelle" (à part quelques porte-drapeaux de l'association très active sur le terrain "
Homosexualités et Socialisme") est bien peu effectivement représentée !
Quand la Transphobie vient des homosexuel(le)s eux-mêmes...
Et, pour n'en citer qu'une, je parlerai ici brièvement de ma propre expérience. Tel le jour où, au début de ma transition, en 2004, recherchant à tout prix un travail
d'été voire plus, j'ai sollicité un emploi auprès d'un responsable d'un restaurant gay du Marais (en recherche d'un(e) employé(e) depuis plus de 10 mois !). Je me suis entendue
répondre : "On n'a pas l'habitude des Trans !"...
Sans commentaire.
J'espère de votre part très prochainement une réponse circonstanciée que je ne manquerai pas de porter à la connaissance de mes fidèles lecteurs.
Salutations.
Caphi, journaliste
Comme vous l'avez remarqué, je n'occupe plus de responsabilité associative. Quand c'était le cas, j'acceptais de rendre des comptes, et bien plus qu'à mes seuls mandants. Mais devoir me justifier
parce que je sollicite un désabonnnement d'une liste de diffusion me dépasse. Faut-il aussi que je me justifie de ne pas lire certains livres, de ne pas acheter certains journaux ?
En quittant le poste de porte-parole de l'Inter-LGBT, je me suis désabonné de la presque totalité des listes de diffusion dont j'étais membre. Quand je me suis retiré de la liste « Non à Edvige
», personne ne m'a reproché de m'être subitement converti au fichage politique des citoyens. Vous demander à être traitée de la même manière que tout le monde, et vous avez raison de le faire,
mais il suffit que je vous applique ce traitement non-discriminant dans le choix de mes abonnements pour que vous preniez à témoin l'ensemble de vos abonnés. Il y a quelque chose qui m'échappe…
En diffusant une lettre hebdomadaire, acceptez les règles qui vont avec.
Et ce d'autant, que, pour ma part, je n'ai aucune leçon à recevoir en matière de lutte contre les discriminations liées à l'identité de genre. A chaque fois qu'il a été possible de le faire, nous
avons porté au plus haut niveau les revendications des associations trans, en tentant de surmonter ses divisions. En 2001, la Lesbian & Gay Pride devenait l'Inter-LGBT, pour intégrer sa
composante trans, et deux ans plus tard, en 2003, le Premier ministre en recevait une délégation de trois personnes, dont le président d'une association trans. C'était une première pour les
organisations homosexuelles comme pour les associations trans. Je ne compte plus les rendez-vous obtenus auprès des parlementaires, de conseillers ministériels, à faire de la pédagogie, expliquer
les concepts et les vécus, et une réalité que tous ignoraient. Mais je reconnais que les résultats n'ont pas été à la hauteur des espoirs soulevés. J'aurais d'ailleurs beaucoup à dire sur
le temps perdu du fait de divisions ou de compétition entre les associations trans, voire le sabotage des initiatives visant à organiser ou fédérer les positions. Aussi, début octobre,
au moment de quitter l'Inter-LGBT, j'adressais ce message aux associations :
- Sur le fond, outre les nouveaux projets, et la continuité sur les dossiers déjà engagés, j'attire votre attention que notre action politique s'est complétée cette année d'un volet judiciaire,
avec efficacité. Sur la circulaire sur les pacs signés à l'étranger, notre action engagée avec le GISTI au Conseil d'État s'est soldée par une victoire totale. Notre implication dans le recours
contre Edvige a conforté notre crédibilité, même si nous sommes restés un acteur secondaire. Or, sur certains dossiers (trans, droits sociaux des pacsés), il nous est difficile d'envisager des
victoires politiques à court terme alors que, sur un plan juridique, nos arguments sont sérieux, et peuvent peser très lourd face à un juge. Il ne s'agit pas de doublonner SOS Homophobie ou le
Ravad, incontournables dans l'assistance aux victimes, mais de porter devant les tribunaux les injustices où, juridiquement, nos chances de victoire sont sérieuses. Refus d'un capital décès
pour un pacsé, refus d'une pension de réversion, refus d'un remboursement de soins pris à l'étranger pour une personne trans, etc. La lutte judiciaire peut être un pendant utile à la lutte
politique, surtout dans une période où les perspectives d'avancées législatives sont faibles.
Je proposais que sur deux dossiers, le refus de remboursement de soins pris à l'étranger, et le refus de changement d'état civil aux personnes ne se soumettant pas à une expertise médicale, ou
qui n'ont pas subi d'opération chirurgicale, l'Inter-LGBT propose un accompagnement juridique, puisque, sur un plan politique, à court terme, nous sommes dans une impasse. Je ne sais pas si la
nouvelle équipe a repris cette idée à son compte, mais je souviens qu'elle avait reçu un bon accueil. L'exemple de Clarisse, qui a obtenu une victoire aux prud'hommes dont je ne connais
pas d'équivalent en matière de lutte contre l'homophobie, devrait inciter le mouvement trans à investir le terrain judiciaire, et à solliciter le soutien des organisations homosexuelles, plutôt
que de chercher à les rendre responsables de tout. Votre expérience auprès d'un établissement gay est douloureuse et insupportable : en 2004, je ne sais pas ce qu'il en était, mais
aujourd'hui, entre l'Inter-LGBT, SOS Homophobie et le Ravad, vous trouveriez toute l'aide nécessaire pour traîner ce commerçant devant les tribunaux.
En espérant que cet échange sera utile,
--
Alain Piriou
alain@alain-piriou.net
Remarque : Les extraits de la réponse d'Alain Piriou
mis en gras sont de mon fait.
Caphi
Ma réponse à Alain Piriou
Monsieur,
Je vous remercie d'avoir répondu si rapidement.
J'espère que votre intervention permettra de comprendre les difficultés de la "communauté transsexuelle" si disparate et aux intérêts et attitudes divergents ; la
cacophonie au détriment d'un message clair qui règne à l'issue de certaines manifestations
trans sont à l'égal du manque de "
visibilité" que nous,
"
minorité des minorités", constatons et surtout subissons tous les jours.
J'espère aussi que nos réflexions et actions - conjuguées ou pas - puissent apporter enfin une dynamique salutaire pour que les associations
homosexuel(le)s et
transsexuel(le)s travaillent réellement ensemble, se soutiennent mutuellement et surtout agissent enfin efficacement.
Cordialement
Caphi
LIRE > Les
Trans', minorités visibles ? (sur la représentation de toutes les
"différences" dans les Marches des Fiertés (ex.Gay Pride)
Réponse d'Alain
Piriou
Merci de la publication de ma réponse. Je partage votre conclusion.
Bien à vous,
Alain Piriou
alain@alain-piriou.net
NOTE IMPORTANTE
Je tiens à préciser que tout(e) abonné(e) a bien sûr librement le
droit de s'abonner ou de se désabonner à ma newsletter. La plupart de mes abonné(e)s rencontré(e)s généralement au
cours de mes reportages, en me remettant leur carte de visite (ou simplement leur adresse E-mail), acceptent et conservent durablement leur abonnement.
Comme précisé dans ma LETTRE OUVERTE, peu pour ne pas dire aucun se désabonne. Ce qui prouve l'intérêt de mon travail citoyen et
gracieux.
D'ailleurs, rares sont les abonné(e)s inscrits à ma newsletter de part ma seule initiative tel que l'a
été il y a environ un an Alain Piriou (jamais croisé ou qui ne m'a jamais été présenté). Il me semblait en effet pourtant important qu'Alain Piriou
ait connaissance des informations - ainsi que mes commentaires - diffusés sur mon blog "Différences" tenu à jour quotidiennement et qui est devenu aujourd'hui UNE RÉFÉRENCE.
Toutefois, je regrette que cette personne - qui a/eut un rôle moteur au sein des luttes LGBT - abonnée depuis un an environ - n'ait jamais
souhaité m'écrire ou simplement me contacter, sauf aujourd'hui pour me faire une demande de désabonnement (non explicitée dans son premier courriel).
Cette LETTRE OUVERTE a permis au moins de créer une réaction de l'intéressé et ainsi d'expliciter plus clairement nos
revendications et nos positions respectives.
Et surtout de créer un débat franc et sincère : j'ai reçu plusieurs réponses par mail de la part de
quelques abonné(e)s. Mais certain(e)s (dont des responsables associatifs) n'ont pas souhaité (disant ne pas vouloir "polémiquer") que leurs écrits soient
mis en ligne. Je le regrette.
Vous pouvez toujours cette page de mon blog
"Différences" : ils seront publiés après modération.
Bien à vous toutes et tous.
Caphi, 30-01-2009