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Différences (le blog de caphi consacré à la TRANSIDENTITE et l'INTERSEXUATION)

Revues de presse et de blogs par une journaliste transgenre qui traite de la TRANSIDENTITE (appelée improprement "transsexualité").Le blog "Différences" est devenu aujourd'hui une REFERENCE FRANCOPHONE sur la TRANSIDENTITE

[Indonésie] l’école coranique des travestis

Pour permettre aux travestis et aux homosexuels de pratiquer le culte musulman en toute liberté, une école coranique leur a été dédiée dans un hameau non loin de Jogjakarta, une ville de Java, relate le Jakarta Post.

Source : Courrier International
Jogjakarta

Souvent perçus comme des déviants sexuels, les lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels sont parfois tenus à l’écart des rites religieux et n’ont pas accès aux lieux de culte.

L’accès à la prière, la transcendance et la sensation de se rapprocher de Dieu sont pourtant des droits religieux dus à tout être humain.

Dans la pratique, ils sont bien trop souvent réservés aux hétérosexuels.
Ariel, un travesti de 30 ans qui vit depuis plus de dix ans à Jogjakarta [une ville de 500 000 habitants, sur l'île de Java], devait s’introduire secrètement dans la mosquée chaque fois qu’il voulait réciter les tarawih [prières du soir pendant le ramadan].

“J’entrais en cachette et je devais porter le sarong pour pouvoir me joindre aux hommes. Certains amis préféraient mettre la mukena [long voile porté par les femmes pendant la prière] et se mêler aux femmes”, dit-il.

Il leur est souvent arrivé de se voir refuser l’accès à la mosquée.

“Même si nous sommes des travestis, nous avons besoin de prier Dieu et d’assister à des rituels. Nous aussi sommes des êtres humains avec des yeux et un cœur. Nous aussi sommes des êtres humains et avons besoin de prier Dieu”, poursuit-il en citant les paroles d’une chanson.
Ponpes Waria

Scandalisée par ces discriminations religieuses, Maryani, 51 ans, a ouvert en juillet dernier une école coranique pour travestis, qu’elle a baptisée Ponpes Waria.

Dans ce petit établissement, situé dans le hameau de Notoyudan, près de Jogjakarta, les travestis peuvent prier librement, sans se sentir opprimés.

Travesti lui-même, Maryani a créé ce lieu pour permettre à ses semblables de se rapprocher de Dieu mais aussi pour accueillir des homosexuels, également victimes de discriminations.

A la différence des autres écoles islamiques du pays, Ponpes Waria n’a ni mosquée ni foyer ni dortoir.

L’établissement abrite une salle de trois mètres sur cinq où les élèves se réunissent pour prier, lire le Coran et approfondir leur connaissance de l’islam.

“Nous ne nous soucions pas de la surface de la salle, mais plutôt de sa fonction et de ce qu’elle nous apporte. L’important, c’est que nous puissions accomplir nos rites religieux et communiquer sans problème avec Dieu”, souligne Maryani.
Durant le mois du ramadan, des dizaines de travestis se sont rendus tous les jours à l’école, où les activités religieuses commençaient à 3 h 30 du matin.

Avant de rompre le jeûne, ils récitaient le Coran et apprenaient les règles de l’islam.

Puis ils psalmodiaient des versets à la gloire du prophète Mahomet et, après avoir rompu le jeûne, ils récitaient la prière de l’isha et les tarawih.
Certains travestis rentraient ensuite chez eux tandis que d’autres restaient à l’école pour prier ou lire des ouvrages religieux en attendant l’heure du repas, juste avant l’aube.

“Depuis l’ouverture de cette école, je me sens plus tranquille pour étudier la religion”, affirme Yesy, un élève.

“Je prie pour être en bonne santé et heureux. Ici on est traité comme des êtres humains. On apprend à lire le Coran ensemble, à rompre le jeûne ensemble, à réciter ensemble les tarawih, le zikir et le tahajud [la dernière prière de la nuit] et à manger ensemble le repas d’avant l’aube. Nous faisons tout ensemble”, dit-il.
En dehors de la période du ramadan, l’école ouvre deux jours par semaine, le lundi et le jeudi.

“Ces jours-là, il y a des récitals de Coran et des cours d’islam”, indique Maryani.

L’école a besoin de capitaux pour continuer à fonctionner mais il est difficile de faire des démarches officielles de dons en raison des suspicions que la demande pourrait susciter.

“Nous souhaitons simplement avoir un lieu où prier et étudier l’islam. Si nous demandons officiellement des dons, les gens pourraient penser qu’il s’agit d’une entreprise”, explique Maryani.
Supri, l’un des enseignants de l’école, fait part de sa joie d’avoir enseigné le Coran à des travestis.

Il explique que les travestis forment un groupe à part dans la société mais que, bien qu’ils soient différents, ils éprouvent les mêmes sentiments que d’autres et ont le courage de vivre leur vie.

“Malgré leurs différences, dit-il, ils s’assument. Ils sont avides d’étudier l’islam et nous devons les respecter.”

Info transmise par François-Xavier, lundi 13 octobre 2008

 
LIRE >
. "Le droit des transsexuels à changer de sexe est un droit de l'homme" [L'Hojatoleslam Kariminia]
(source : "Transsexualité en Iran" sur Wikipédia)
. Le chiite rafidhi Al-Rohani rend licite la transsexualité et le mariage avec un trans - Mejliss el kalam (forum de discussion)


Reportage
Indonésie : l’islam se travestit
Religion . Les transsexuels du pays ont leur propre lieu de culte depuis un an.

Jusqu’alors ils allaient prier sous les quolibets, sinon les menaces. Déguisés en homme ou en femme, ils se glissaient dans les salles de prières des mosquées, redoutant d’être démasqués. Maryani a subi ce genre d’humiliations, avant d’ouvrir, en juillet 2008, la première école coranique pour waria : les transsexuels, selon l’appellation indonésienne.

par ARNAUD VAULERIN YOGYAKARTA, envoyé spécial de Libération, 05/09/2009

Ce lieu unique dans le plus grand pays musulman au monde, qui accueille homosexuels et travestis, se niche dans une ruelle de Notoyudan, quartier calme de la cosmopolite capitale culturelle du pays, Yogyakarta. Pas de banc, de salle de lecture, ni même de mosquée dans cette école-là. Ce centre coranique est à nul autre pareil. Des trophées de concours de maquillage se mêlent à des clichés kitsch de La Mecque, des photos de shows entourent les reproductions de sourates.

Coiffeuse. Dans une salle aux murs jaunes et orangés, Maryani reçoit chez elle, sans prosélytisme. Née homme et catholique en 1960, elle est devenue femme à 15 ans. Puis elle s’est convertie à l’islam. «Dieu l’a voulu ainsi, j’ai respecté sa volonté. Mais je suis resté physiquement comme il m’a faite.»

Cette ex-prostituée et chanteuse s’est reconvertie en pieuse coiffeuse qui maquille et coiffe danseurs, artistes et futurs mariés. C’est ainsi qu’elle finance les activités du centre qui accueille régulièrement une trentaine de transsexuels, de gays et de lesbiennes.

«On accepte volontiers des hétérosexuels, s’amuse Maryani. Mais ce sont surtout les "waria" qui viennent. Eux aussi ont le droit d’être croyant. Ici, ils n’ont plus besoin de porter le mukena [le voile pour les femmes, ndlr] ou le sarong [pour les hommes, ndlr]. Ils viennent étudier et surtout apprendre les rituels, réciter le Coran et manger ensemble, sans stresser, sans menace.» Et sans séparation. Tous se retrouvent sur le carrelage blanc de la salle commune. Là sont dispensés les cours gratuits par une vingtaine d’ustadz, des enseignants musulmans, qui se relaient. Ils viennent de la grande école voisine du prêcheur Hamrolie Harun. Depuis plusieurs années, cet homme côtoie les transsexuels et s’affiche à leurs côtés. Il a encouragé la création de Senin-Kamis, le nom officiel de l’école, qui signifie simplement lundi-jeudi, les jours d’ouverture.

Respect. Certes, le Conseil des oulémas a pu s’agacer des shows de travestis destinés à chauffer la foule des meetings lors de la dernière campagne des législatives du 9 avril. Mais c’est oublier la tradition vivace des waria en Indonésie et la réalité de la diversité culturelle dans ce pays mosaïque de 235 millions d’habitants où cohabitent musulmans, chrétiens, hindouistes et bouddhistes.

A Yogyakarta, le clergé, lui, n’a rien trouvé à redire au travail dévoué de Maryani. «Le chef de la mosquée est venu. C’est une marque de respect, non ?» Un voisin passe la tête par la porte et salue. Plus tard, une femme apporte des légumes.

Le succès de Senin-Kamis repose sur les épaules de Maryani. Mariée puis divorcée, elle a adopté une fille qui a 8 ans, et se dit aujourd’hui «sereine et en paix». Elle vit sa foi avec une candeur désarmante. En matriarche dévote, Maryani veille sans compter sur son centre. «Choquée» par le tremblement de terre du 27 mai 2006, qui a fait plus de 5 000 morts à Yogyakarta, elle a commencé à collecter de l’argent auprès des transsexuels. L’idée de l’école est venue plus tard. «C’était mon destin d’ouvrir ce lieu. Avant de mourir, je veux faire du bien et aider les autres "waria".»

Elle a convaincu Tini de la rejoindre. Cette discrète pratiquante de 41 ans assiste Maryani depuis plusieurs mois. «Je vis enfin sans menace, dit-elle. Ce n’était plus possible d’endosser le sarong pour ne pas choquer les gens.» Un planning, punaisé au mur, détaille les activités : il affiche complet.

lien de l'article : http://www.liberation.fr/monde/0101588913-indonesie-l-islam-se-travestit
 
lire les réactions sur le site de Libération 

Interdits de mosquée en raison de leur orientation sexuelle, ils peuvent, dans une école, créée en juillet 2008, et réservée aux transexuels, lesbiennes et homosexuels, pratiquer librement leur religion. Elle attire de tout le pays les laissés-pour-compte de l'islam. Mariyani, scandalisée, a fondé Pondok Waria - un refuge pour transsexuels - afin de combattre cette discrimination indigne, selon elle, d'une religion prônant le respect et la tolérance. "Le Coran n'accepte pas l'homosexualité ou la transsexualité, mais ne l'interdit pas non plus. De toute façon, Dieu ne fait pas de différence entre les hommes", insiste-t-elle, consciente que l'ouverture d'un tel centre dans le plus grand pays musulman (210 millions de fidèles), a pu embarrasser les institutions religieuses. Depuis des années, les communautés gay et transsexuelle sont dans le collimateur de mouvements religieux. Des organisations, conservatrices comme le Conseil indonésien des oulémas, traditionnelles ou plus radicales, condamnent ces pratiques (...) Partisane de réinterpréter le Coran, Siti Musdah Mulia milite pour une meilleure intégration des homosexuels dans la vie religieuse. Professeure de pensée islamique à l'Institut des sciences, elle riposte avec un autre extrait du Coran : "Hommes et femmes sont égaux, indépendamment de leur ethnie, de leur richesse, de leur position sociale et même de leur orientation sexuelle." Selon elle, l'homosexualité est "naturelle" et vient de Dieu. "C'est l'essence même d'une religion que d'humaniser les êtres humains et de leur devoir respect et dignité", conclut-elle...> lire le reportage d'Arnaud Guiguitant paru dans Le Monde du 6.01.2010 
 
[AUDIO] Des musulman-e-s transidentitaires indonésiens prient entre eux. ("L’islam ou la religion d’une pratique personnelle apaisée") - (source BBC, 8 January 2009)


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