Pour ce qui est de la France, il n’est que de songer à Coccinelle, qui fut la grande figure du cabaret dans les années 50 et 60, ou encore à Bambi, qui fut également une des égéries de cette époque, au dramaturge Copi, au Troisième sexe d’Indochine, à Mylène Farmer qui chante Sans Contrefaçon, ou encore à Madame H, aujourd’hui. Bref, dans le monde entier, la transidentité a partie liée avec le monde du spectacle.
Cette visibilité notable dans le monde des arts contraste singulièrement avec les autres domaines de la vie sociale, économique et politique, où les personnes trans’ demeurent particulièrement invisibles -où elles sont plus exactement invisibilisées. En guise de contre-exemple, on pourrait citer Georgina Beyer, membre du Parlement néo-zélandais, première transsexuelle élue députée dans le monde, ou encore Vladimir Luxuria, députée transgenre italienne; mais il s’agit, dans un cas comme dans l’autre, de femmes qui avaient d’abord commencé leur carrière dans le monde du spectacle, et ce n’est qu’alors qu’elles purent obtenir une reconnaissance sociale et politique.
Cette présence trans’ dans le monde du spectacle n’est pas tout à fait un hasard. Dans beaucoup de pays, les lois ou les usages interdisaient aux femmes de faire du théâtre, ou de se mêler aux spectacles. Dans ces conditions, les rôles féminins étaient souvent tenus par des hommes, ce qui était le cas par exemple à l’époque de Shakespeare. Dès lors, le travestissement était une pratique ordinaire dans ce domaine, qui autorisait, voire favorisait des transgressions de genre qui, partout ailleurs eussent été interdites. C’est pourquoi dans de nombreux pays, ce milieu fut particulièrement investi par les personnes trans’.
Pour autant, cette présence n’était guère que tolérée. Or, la tolérance est toujours précaire. C’est ce que montre par exemple le film Adieu, ma concubine, car les comédiens travestis de l’époque impériale qui jusqu’alors étaient relativement acceptés, furent bien vite condamnés par la Révolution communiste en Chine. De même, en France, la tolérance relative dont jouissaient les travestis dans le milieu du spectacle fut fortement limitée par l’ordonnance du préfet de police Lépine, en 1907, qui interdisait le travestissement en dehors des dimanche, lundi gras et du jeudi de la Mi-Carême, à moins d’une autorisation spéciale, ordonnance élargie à toute la France et aux colonies en 1949 par le ministre de l’intérieur, Jules Moch. Cela n’interdisait pas toute représentation de ce genre, mais cela permettait de maintenir la pression et la menace. Cela permit par exemple, en 1961, de fermer le Carrousel, qui était à l’époque le cabaret le plus couru de Paris.
Aujourd’hui, la culture trans’, celle des transsexuels, transgenres, travestis et drags se développe dans le monde entier, dans sa diversité extrême, sans parler des apports du mouvement queer, qui vient renouveler et enrichir à la fois cette production culturelle.
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