18 Mai 2009
[tribune] Projet de rapport HAS… Ouf, ça
n'est qu'un projet ! par Isabelle (transsexualité.com)
De quoi parle-t-on ? Faire évoluer la prise charge médicale du transsexualisme ou prendre en charge
le transsexualisme ?
Le document consultable en ligne
s'intitule "Situation actuelle et perspectives d'évolution de la prise en charge médicale du transsexualisme en France" Projet nécessaire et louable en
effet vu la situation empirique dénoncée depuis longtemps ! Mais on lit sur le communiqué de presse qu'il s'agit d'un "Projet de rapport sur la prise en charge du
transsexualisme", puis, on lit sur la même page: "La Haute Autorité de Santé a élaboré un projet de rapport sur le transsexualisme et sa prise en
charge médicale […]" Le sujet est trop sérieux pour ne pas souligner ce manque de clarté qui marque un embarras certain… ce que l'on peut comprendre.
Qui parle de qui ? Ou "à qui profite le crime" ?
Exercice impossible en effet que celui de mettre toutes les personnes transidentitaires et leurs problèmes
sociétaux dans une seule case, exercice réalisé de surcroît par un organisme spécialisé en santé (un projet interministériel serait plus judicieux). Ce que tente malgrè tout les
auteurs, quitte à évacuer le texte intéressant de Marcela Iacub (on nous précise que son texte "n'engage que la vision de l'auteur") et à accumuler des amalgames. Et
l'on comprend donc, dans les conclusions, que l'on ne parlera que des personnes désireuses de traitements hormonaux assortis d'une chirurgie génitale, diagnostiquées grâce au
DSM, devant être des patients "pris en charge" à travers des protocoles dans des centres "experts"… Mais n'est-ce pas justement ce qui existe déjà, de façon non
officielle ? Nous ne sommes pas dupes de la pression majoritaire exercée par les équipes professionnelles françaises existantes, ceux-là même qui sont les
"experts" consultés par la HAS, dont un pourcentage non négligeable de parisiens (on peut légalement retrouver leur déclaration publique d'intérêts sur la page dédiée de la HAS). Ces équipes ont tout
intérêt à ce que leur structure soit légalisée et non plus tolérée. Mais manifestement, à ce stade (de projet) du rapport, on s'éloigne vite de la déclaration
d'intention : "Projet visant à un meilleur bien-être des trans" au profit du bien-être d'autres, auxquels s'opposent depuis longtemps la plupart des
associations.
Comment parle-t-on des personnes transidentitaires ?
• Puisque le bien-être des trans est un objectif, nous ne comprenons pas pourquoi le
rapport ne respecte pas une demande grammaticale simple exprimée par toutes les associations : depuis longtemps en effet, le genre grammatical est inversé dans tous les
textes des "experts": "un homme transsexuel veut devenir une femme" alors que le bon sens indique qu'un homme transsexuel, c'est un FtM. Cela serait un signe encourageant et marquant le respect si le futur rapport applique cette règle. (sans rien engager par ailleurs)
• Malades mentaux ? Une précaution maladroite est prise à l'évocation du DSM, on nous dit en effet de ne surtout pas penser que cela est discriminant d'être sur cette
liste… mauvaise blague ?
• Patients ou usagers ? De la même façon, les auteurs, en début d'ouvrage, nous indiquent que "patients" est synonyme d'usagers des services
de soins. Mais pourquoi alors ne pas employer le terme "usagers", comme cela existe dans d'autres rapports de la HAS ?
Conclusions, propositions et perspectives pour une deuxième étape
De quoi et de qui parle-t-on ? De la prise en charge de malades mentaux ou d'une
meilleure prise en charge de l'aspect médical du transsexualisme ?
On a la sensation d'un grand fourre-tout cousu par des auteurs mal à l'aise face à une tâche qui dépasse leur champ de
compétences (la France avant-tout doit prendre l'initiative politique de la déclassification DSM, ce qui libérera les médecins de la toute puissance du
diagnostic pour se consacrer alors à un véritable travail d'accompagnement). Dans cet écrit, ajoutons l'anonymat des experts… ce que certains ne comprennent pas… et l'impression
que l'on veut caresser les trans' militants dans le sens du poil en prenant quelques précautions verbales… sur les conseils sans doute de personnes avisées
(expertes?).
L'équipe de l'HAS n'a pas encore travaillé avec les associations et personnalités trans', celles-ci sont
porteuses de propositions innovantes et sérieuses, une seule réunion a eu pour but l'écoute des "revendications", l'autre fut une réunion
d'information. Il serait temps en effet de prendre au sérieux l'ensemble de ceux qui, par le vécu et l'expérience de terrain, de
confrontation à la vie sociale et la rencontre de centaines de personnes transidentitaires, de leurs proches, de leurs enfants, de leurs parents, possèdent un savoir bien
différent de celui des "experts" de cabinets hospitaliers. Pour exemple, ceux-ci préconisent encore le fameux test de vie réel : c'est un suicide social commandé, idem pour les traitements hormonaux décomposés en deux temps: programme médical pour
créer une dépression… procédés archaïques et dangereux, créant du mal-être et non du bien-être dans une période où l'isolement est tellement fréquent.
Bien que le projet de rapport mentionne que les "congrès" (on peut comprendre également les "écrits") organisés par les trans' ne sont pas crédibles puisque
non objectifs… souhaitons que la deuxième étape de ce travail verra le jour d'un réel partenariat qui prendra en compte les
réactions et les résultats de la consultation publique, dans le cas contraire, on aboutira à une usine à gaz mensongère en
décalage avec la réalité qui risque de faire fuir plutôt que de réunir, telles que les conclusions et préconisations provisoires le font
penser.
Isa², 11/05/09, http://transsexualite.com
Communiqué de presse sur le site de la HAS -
Projet de
rapport .pdf