3 Octobre 2007
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Camille, annonce sur son blog, le vendredi 5 octobre 2007
:
"Je viens d'apprendre que la partie adverse ("l'employeur") demande le report de la plaidoirie du 8 octobre invoquant la présence de la HALDE. Le procès sera donc reporté à une
date ultérieure. Je posterai ici [sur
son blog] la nouvelle date qui sera décidée par le juge".
Le 22 février 2008, elle précise la nouvelle date pour les
prud'hommes : "Contrairement a ce qui avait été annoncé, la plaidoirie aura lieu le LUNDI 31 MARS [2008]aux prud'hommes de Montpellier, section
Cadre".
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Je suis née sous le nom de Jean-Pierre Pruvot. Mon enfance en Algérie, bien que globalement heureuse, est en partie gâchée par l’opposition
entre, d’une part, ma volonté d’être une fille – et même la certitude que je le suis et le resterai – et, d’autre part, la réalité extérieure qui me fait garçon. En mai 1946, je fais un
rêve bouleversant. Un cercueil se transforme en grand bloc de glace. Je me penche, et je distingue... mon corps, une fille, dans une enveloppe cristalline ! En m’éveillant, je sens tout
mon être inondé du bonheur d’exister. Je sais que j’aurai assez de persévérance, de force pour attendre le moment où fondra la glace.
Le temps passe et je m’oblige à une constante contention (voix, coiffure, vêtements, gestes, démarche...) pour éviter le scandale, surtout après la mort de mon père, qui me fragilise
alors que je n’ai que 14 ans. Je passe ma vie à lire dans ma chambre et à attendre un miracle qui fera de moi la femme que je suis. Mon aspect masculin n’est qu’un camouflage. Devant le
miroir, j’apprends à fixer mon image, à la remodeler au gré de mon imagination. Je me donne des contours conformes à mon moi intime que j’appelle « Marie ». Je mobilise toute ma
vigilance à me construire, et quand j’y parviens, j’atteins des sommets de bonheur d’où il m’est difficile de redescendre.
A l’adolescence, l’idée que puissent apparaître les stigmates de la virilité me terrorise. Mais j’ai de quoi me rassurer. J’ai maigri et grandi, je me trouve les traits affinés, la peau
douce. Je finis par croire que Dieu a exaucé mes prières et que, peu à peu, il fait de moi la jeune fille qui ne vivait encore que claustrée dans une écorce. On peut bien me trouver «
mignon », « fin » ou encore « efféminé », ce n’est pas ce qui fait mon affaire. Ce n’est pas une question d’homosexualité ou d’hétérosexualité, c’est une question de grammaire. Je
revendique mon appartenance au féminin.
En cet été 1952, un événement ouvre une trouée dans mon horizon. Je découvre au casino tout proche une tournée du cabaret Le Carrousel, avec la fameuse Coccinelle, qui en est à ses
débuts. Des travestis, des artistes ! Des bijoux somptueux, des costumes époustouflants, toutes sortes de falbalas, d’excentricités, un spectacle magnifique ! Mon sort est fixé : en
septembre 1954, je rentre au Carrousel à Paris. Je deviens Bambi. Je peux faire des projets, je suis en train de réussir ma vie. Par Coccinelle, j’apprends qu’à Casablanca le Dr Burou
commence à pratiquer des opérations de « réassignation de sexe », très au point, dit-on. Je me renseigne, je me mets à rêver, j’y crois. On ne renonce pas au plaisir. Rien ne me semble
rédhibitoire.
Je vois arriver mes 25 ans. Tout me presse. Marc, mon compagnon, répète que je suis parfaite comme je suis. Un accident accélère tout : je manque de me noyer. Au moment où je crois que
je vais mourir, je me promets que si, par miracle, je m’en sors, mon premier geste sera de m’en remettre au Dr Burou. L’amour que je porte à Marc, pourtant fort et sincère, ne peut
peser dans la balance. Je m’envole pour Casablanca le 17 avril 1961.
Clinique du Parc. L’autorité paternelle du Dr Burou me rassure. Pour 5 000 francs de l’époque et en deux heures et demie, le mirage sera enfin matérialisé. Appréhension de l’accident.
Réveil nauséeux. Les bons soins du personnel ne peuvent tout à fait atténuer l’anxiété de voir des tuméfactions, des tuyaux incorporés, des chairs anesthésiées. Mais il y a quelque
chose d’accompli, une avancée, une renaissance. J’ai hâte de m’observer et de me découvrir. En quinze jours je suis fixée sur la réussite de l’opération. Dès que je suis sur pied, je
guette, constate au jour le jour la métamorphose. Je me regarde nue dans le miroir, je m’apprécie, je m’admire et, bientôt, sans étonnement, je renoue avec mon corps qui est enfin le
vrai.
Alors, j’attends qu’on rapatrie mon état civil. Pendant six ans ! En désespoir de cause, je me rends à Alger où les autorités m’accordent aussitôt le changement : Jean-Pierre devient
Marie-Pierre, née de sexe féminin. Ce jugement s’applique en France automatiquement, sans procédure d’exequatur. Ma confiance me fait voir des portes ouvertes, des succès à portée de
main. Je sens le feu sacré en moi, même s’il n’a pas encore d’objet précis auquel s’appliquer. Je n’ai qu’un mobile : être apte à mener une « vie normale ». Je reprends mes études,
quitte le monde du spectacle avec regrets pour devenir professeure de lettres, une autre aventure fantastique.
Je n’ai pas choisi ma vie. J’ignore par qui ou par quoi elle me fut imposée. Lorsque, à 4 ans, je refusais mon prénom et voulais avoir des robes, je menais mon combat. Je l’ai conduit
comme j’ai pu. Je ne sais si j’ai vaincu.
[cinéma] | ||||||||||||||
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A en croire les données livrées par l'Insee cet été, les hommes auraient toujours quelque mal à "faire couple", tout au moins sur les tâches ménagères. Et qu'importe si leurs conjointes travaillent ! Les femmes effectuent en moyenne les deux tiers du travail domestique - soit 680 heures de plus que les hommes sur l'année....
Dans leur dernier ouvrage (Quoi de neuf chez les filles ? Entre stéréotypes et libertés, Nathan, 14,95 euros), Christian Baudelot et Roger Establet, compères en sociologie et spécialistes de l'éducation, fournissent des clés de compréhension. Ils reviennent sur les pas d'un livre qui avait fait du bruit en 1973 - Du côté des petites filles, d'Elena Gianini Belotti - en recensant les stéréotypes qui, dès la petite enfance, préparent les petites filles à leur future place dans la société à l'ombre du sexe fort. A trente-cinq ans d'intervalle, rien n'a fondamentalement changé. Malgré le féminisme ou la participation des femmes au travail et aux ressources du foyer.
L'appartenance à un genre, "l'identité de genre", cette construction socioculturelle qui nous rapproche de notre sexe biologique, reste une construction fondamentale qui organise la personnalité : avant de savoir si l'on est fille ou garçon, on naît garçon ou fille dans le regard et le désir de ses parents. Ces désirs, dans le temps, ne varient guère. Baudelot et Establet rappellent que "cette imposition de normes de comportement ne rencontrerait pas le succès qui est le sien si elle ne répondait pas à une forte demande de la part des enfants eux-mêmes. (...) Filles et garçons prennent un plaisir évident à se conformer aux rôles attendus".
Sans parler de plaisir, pour les plus âgés, cela évoque les conclusions de l'Observatoire de la vie étudiante, sur des données de 2003, qui tentait de comprendre les raisons pour lesquelles les filles convertissaient rarement leur supériorité scolaire en supériorité professionnelle. L'Observatoire notait que les bénéfices scolaires retirés par les filles en début de cursus du fait d'un comportement plus studieux "tendaient à être neutralisés lorsque le niveau s'élève par le fait qu'elles sont plus précocement chargées de tâches domestiques et préoccupées par les responsabilités parentales et conjugales", que, souvent d'ailleurs, elles anticipent. Vivant seules, les étudiantes sont proportionnellement plus nombreuses à faire la cuisine que les étudiants. Et moins nombreuses, à tous âges, à rapporter leur linge sale au domicile parental...
Cependant, par petites touches, les choses évolueraient. La construction du genre s'effectue, depuis les années 1970, dans une société mixte. Et la grande variété des activités de temps libre permet à la fois cette construction et la rencontre de l'autre sexe sur des terres partagées. Les filles, observent Baudelot et Establet, s'aventurent davantage aujourd'hui sur le terrain des loisirs masculins. Bien plus que l'inverse, question de valorisation. Car, au fond, le problème ne serait pas tant l'existence de stéréotypes que la possibilité de pouvoir agir sur leurs contenus et les valeurs afférentes, afin que les différences puissent cesser un jour de renvoyer à des inégalités.